Pierre Vassiliu (suite)
LA LIBRE BELGIQUE Article Original
Chanson
Merci d’être Vassiliu
Dominique Simonet
Mis en ligne le 14/05/2007
– – – – – – – – – – –
Ovni de la chanson, Pierre Vassiliu était pour un soir au Marni à Bruxelles.
Voyageur, avec toujours autant d’amour dans ses valises.
C’est dans un théâtre que Pierre Vassiliu a fait son retour en Belgique, vendredi dernier. Quand est-il venu la fois précédente ? Qu’importe, ce qui compte, c’est qu’il soit là, grâce à la bonne idée de Paul-Jules Imberechts, ci-devant patron de feu le Travers, club bruxellois pépinière de talents.
Pour un retour, c’en est un, même s’il n’y a pas les producteurs de Johnny derrière, comme pour Polnareff. Pas de Bercy à la chaîne, pas de Forest National hors de prix, non, juste le Marni, près de Flagey, l’artiste seul en scène, juste devant son public.
Vassiliu, c’est un nom bien français, ça ? De père roumain, de mère tourangelle, ce Pierrot-là , un temps concurrent d’un autre – Perret – a roulé sa bosse sur tous les continents, et, avec son sens aigu du partage, nous a toujours emmené dans ses bagages. « La vie ça va » est une samba, « Que linda Cuba » un son, « Léna » une ballade africaine, en hommage à sa fille, née à Dakar.
Non, Pierre Vassiliu n’est pas un précurseur de la world music; par ses adaptations, il a fait connaître à nos latitudes les musiques d’un monde qui était encore vaste. Il paraît que les Brésiliens n’ont pas apprécié sa façon de traiter « Partido Alto », de Chico Buarque. Trop léger à leur goùt. Les Brésiliens n’ont pas toujours le sens de l’humour et « Qui c’est celui-là « , l’air de rien, est un bel hymne à la liberté, avec cette phrase définitive « Mais ça emmerde les gens quand on vit pas comme eux. »
Pierre Vassiliu, qui aura 70 ans le 23 octobre prochain, n’a plus la démarche très assurée. Erodé par le ressac de la vie, il n’en garde pas moins la moustache aussi gauloise que certains de ses mots, le sourire malicieux, le regard aquilin. Mais le plus beau, chez lui, ce sont ses mains aux gestes lents, doux, qui laissent deviner tout ce qu’elles ont touché. Au milieu du spectacle, lui qui, le reste du temps, est accompagné de musique enregistrée, prend sa guitare pour un medley de ses titres croquignoles, ceux des années soixante quand le langage pouvait tout se permettre. « Armand », « Ma cousine », « La femme du sergent » oscillent entre Georges Brassens, toujours lui, Nino Ferrer, encore lui, et Boby Lapointe, té alors. Ce n’est pas pour rien qu’une partie de son dernier album, « Pierre Précieuses », a été capté à Pézenas, patrie du Boby.
Comme tout voyageur, Vassiliu est chez lui chez nous. Il y a des complices, Frank Wuyts le claviériste et Denis Van Hecke le violoncelliste. Tout deux ont fait partie de combos improvisateurs comme Aqsak Maboul ou Musique Flexible, tout deux ont oeuvré pour Jacques Higelin et le Pierrot ici présent. Ils sont évidemment dans la salle, Denis ayant apporté son violoncelle car il ne voulait à aucun prix manquer l’invitation « Dans ma maison d’amour ».
« Qui c’est celui-là ? » « Voyant que sur terre tout n’était que vice, et que pour faire des affaires je manquais de malice, je montai dans mon engin interplanétaire, et je ne remis jamais les pieds sur la terre. » Dieu sait donc quand Pierre Vassiliu reviendra, mais l’important, c’est qu’il ait été là , et bien là .